Nous parlons trop à nos animaux…

Pourquoi le langage verbal peut nuire à la compréhension… et à la relation

Nous aimons leur parler.

Nous leur expliquons ce qu’on fait, on commente ce qu’ils font, on répète leurs prénoms à l’infini. On leur dit “non”, “viens”, “assis”, “allez”, “pas là”, “tu descends”, “non, reviens”, “mais je t’ai dit non !”... Et souvent, sans s’en rendre compte, on leur parle comme à des humains.

Mais voilà : nos animaux ne parlent pas notre langue. Et à force de parler sans cesse, nous nourrissons du bruit plutôt que de la communication. Nous finissons par devenir un fond sonore, sans signification réelle pour eux.

Et c’est ainsi que, peu à peu, le lien se brouille.

Langage verbal, para-verbal, non-verbal : trois modes de communication

Avant d’aller plus loin, il faut comprendre de quoi on parle.

Le langage verbal

C’est celui des mots. Celui que nous utilisons entre humains : des sons codés, structurés, dotés d’un sens partagé.

Chez l’animal, ce langage-là n’a aucune valeur symbolique. Le mot “assis” ne veut rien dire par lui-même. Ce qu’il apprend, c’est la conséquence associée à ce mot : posture, ton de voix, récompense, contexte.

Le langage para-verbal

C’est le ton, le rythme, le volume et l’énergie avec lesquels nous parlons.

Un “viens” doux, régulier et joyeux ne provoque pas la même réaction qu’un “viens” crié, rapide et tendu. C’est ce langage-là que nos animaux perçoivent le mieux :
👉 ils lisent nos émotions dans la voix,
👉 ils perçoivent notre état intérieur avant même nos mots.

Le langage non-verbal

C’est le corps.
Les postures, les gestes, la direction du regard, la distance, la respiration. C’est le langage naturel des animaux, celui qu’ils utilisent entre eux. Et c’est là que se joue la majorité de la communication interespèces.

Les animaux sont des experts du non-verbal (et nous, des bavards)

Les chiens, les chats, les chevaux lisent nos micro-expressions, nos tensions, nos respirations. Ils ressentent avant de comprendre. Ils voient ce que nous essayons de cacher.

Nous, humains, avons appris à nous reposer sur les mots. Nous avons perdu une partie de notre capacité à observer, ressentir et décoder. Là où l’animal lit un ensemble cohérent de signaux (position du corps, ton, énergie), nous, nous ne voyons souvent… que le mot.

Et c’est là que le décalage s’installe.

On dit “assis” avec le dos tourné, les bras croisés, le souffle court. Le mot dit “calme-toi”, le corps dit “je suis tendu”. Et l’animal, lui, choisit ce qu’il comprend le mieux : le corps.

Quand on parle trop, on désensibilise l’animal à notre voix

À force de répéter, répéter, répéter… nos mots perdent leur valeur d’information. L’animal cesse d’écouter, non pas par désobéissance, mais par saturation.

Prenons l’exemple classique du chien à qui l’on dit “viens” cinq fois. Il ne vient pas au premier appel, alors on répète. Le ton monte, le stress monte, et le chien apprend que :
➡️ le mot “viens” n’a pas d’urgence,
➡️ ou pire : qu’il annonce un humain tendu qu’il vaut mieux éviter.

Le mot devient un bruit parmi d’autres.

Chez le cheval, c’est pareil : le flot continu de paroles pendant le travail crée une pollution auditive et émotionnelle. Le cheval se coupe, décroche, et finit par n’écouter que les tensions du corps pour deviner ce qu’on attend.

Ce que cela provoque chez l’humain

Quand notre animal “n’écoute pas”, nous avons l’impression qu’il nous ignore, qu’il “fait exprès”. Et très vite, la frustration s’installe.

On se fâche. On hausse le ton. On répète plus fort. Et plus on parle, moins il nous écoute.

C’est un cercle vicieux : le besoin d’être entendu devient un flot de paroles, et le flot de paroles éteint la réceptivité.

Ce sentiment d’être “transparent” face à son animal touche profondément notre besoin de contrôle et de reconnaissance. Mais ce n’est pas de la mauvaise volonté : c’est simplement une différence d’espèce et de code.

Parler moins pour être mieux entendu

L’objectif n’est pas de ne plus parler du tout, mais d’apprendre à parler moins et parler efficacement.

Chaque mot doit avoir un sens clair, stable et cohérent. Et il doit être soutenu par un corps qui dit la même chose.

Quelques repères simples :

  • Parlez avec une intention précise.

  • Donnez une consigne claire, une seule à la fois.

  • Laissez le temps à l’animal de traiter l’information.

  • Observez sa réaction avant de répéter.

  • Soutenez vos mots par votre posture, votre respiration, votre regard.

C’est dans le silence maîtrisé que l’animal apprend le mieux à nous lire.

En conclusion : parler moins, communiquer plus

Le problème n’est pas que nous parlions. C’est que nous remplissons le silence au lieu de l’exploiter.

Un animal ne comprend pas nos phrases. Mais il comprend nos intentions. Et celles-ci passent par l’attitude, le souffle, la cohérence entre le verbal et le non-verbal.

Apprendre à se taire un peu plus, c’est redonner toute sa valeur à ce qu’on dit. C’est permettre à notre animal d’écouter, de réfléchir et comprendre ce qu’on attend de lui…

La communication n’est pas qu’une question de mots.

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